En 1998, nous atterrissons à Tahiti, mon père, ma mère, mon frère et moi. À ce moment là, aucun de nous quatre n’imaginait que cette rencontre serait un coup de foudre entre la Polynésie et nous. La mentalité, le rythme de vie, la cuisine, la culture, la danse, Makau Foster, le tatouage, chacune de ces choses nous a touché au plus profond de nos êtres.
Mon frère était encore petit, maman a prit un congé parental de deux ans pour profiter de ce Paradis sur terre. Il faut dire que le salaire de mon père suffisait largement pour subvenir à nos besoins sans se priver. Alors maman a décidé de reprendre une de ses passions mise entre parenthèse pendant plus de dix ans: la danse. Exit la danse classique, ici on danse le Ori Tahiti. Il y a quelque chose de gracieux, d’assumer, dans le Ori Tahiti qui a sûrement dût plaire à maman, alors elle s’est plongé dedans à corps perdu.
Danser, et danser encore avec Makau Foster
Plusieurs heures par semaine, maman dansait, et moi aussi d’ailleurs. Et pas avec n’importe qui, avec Makau Foster. Danseuse, cheffe de troupe et chorégraphe reconnue de Tamariki Poerani. Maman y met tout son cœur et toute son énergie, en moins d’un an elle rattrape ce que d’autres ont mit des années à apprendre, elle tresse, elle coût, elle chante, elle apprend la langue, les mouvements, les chorégraphies. Elle assimile la culture, elle la popa’a. Et moi je suis, je danse, je chante, j’oublie à moitié le français, et ça me convient très bien.
Un jour, maman danse au Heiva, et Makau la met en première ligne. Elle, la blanche qui danse depuis un peu plus d’un an. Vous vous rendez compte? Il paraît que ça a marmonner, mais c’est Makau qui décide, et si maman est en première ligne c’est qu’elle l’a mérité. Un point c’est tout.
Il est temps de rentrer
Nos années à Tahiti passent, et un jour, il est temps de rentrer. Quitter la Polynésie pour les Vosges je vous avoue que ce n’était clairement pas la meilleure période de ma vie… Et voilà, on jette nos colliers de fleurs dans le lagon à PK18 en regardant le soleil se coucher derrière Mo’orea. Il paraît que si on jette ses colliers dans le lagon, on reviendra un jour à Tahiti. Clap de fin, fini la danse, fini les belles robes fleuries, fini le poisson cru et bonjour la neige. Bon, j’avoue, c’était aussi génial de pouvoir revoir la famille, mais je vous avoue aussi que la France ne m’avait pas vraiment manqué.
Retour au Fenua
Aujourd’hui, nous sommes en 2019 et je suis de retour à Tahiti. Comme quoi, c’était une bonne idée de jeter les colliers de fleurs dans le lagon, ça a marché. Au moment où j’écris ces lignes, je suis sur un banc, place Vaiete à Papeete, il est 19h. Ce matin, j’ai trouvé un numéro de téléphone et j’ai appelé, poussé par mes copines, pour prendre quelques cours et danser avec Makau Foster. Pendant presque 20ans j’ai continué à suivre ce qu’elle faisait, merci Facebook. Alors j’ai appelé, et j’y suis allé. Quel plaisir de danser à nouveau avec celle qui a fait naître cette passion en moi, qui m’a permit de grandir en gardant toujours en tête à quel point les femmes sont belles et fortes.
Je ne suis même pas certaine d’avoir les mots pour décrire tout ce que je ressens en réalisant que oui, je suis revenue, et oui, j’ai dansé à nouveau avec Makau Foster. C’était mon Everest et je l’ai fait bordel. D’ailleurs je vous en ai déjà parlé il y a un an dans cet article: Tahiti, mon corps, la danse et moi
Danser avec gratitude
Après le cours nous avons beaucoup discuté. Makau dit qu’elle m’a reconnu, ou plutôt, elle a reconnu ma mère, car on se ressemble beaucoup. Qu’elle se souvient de moi, et ça m’a ému. Car elle en voit passer des petites filles et des femmes depuis qu’elle enseigne. J’étais ému qu’elle se rappelle mon visage, elle qui m’a tant marqué. D’ailleurs, j’ai prit un abonnement pour le mois, à raison de 3 cours par semaine je n’allais pas manquer ça! Ses conseils et sa bienveillance valent de l’or. Alors merci Tatie. Merci du fond du cœur pour tout ce que tu m’as offert, peu être même sans le savoir.
J’ai la chance d’avoir trouvé en France deux danseuses et femmes extraordinaires qui continuent ce que tu as commencé il y a bientôt vingt ans. Mareva et Vainui qui m’aident un peu plus chaque jour à m’épanouir et à danser avec mon cœur. On se voit demain à la salle de danse.